Bonjour, bonsoir ! Cette semaine, on commence fort avec un sujet qui a connu et connaît encore pas mal de tabous : qu’est-ce que la sodomie ?
Vous trouverez peut-être surprenant que ce terme revienne sur le tapis de nos jours… Notre société, il semblerait pourtant, n’est pas encore aussi éclairée qu’elle le pense à ce sujet !
Quelle est donc la signification originelle du mot sodomie ? Quel rapport avec la Génèse et est-ce réellement un terme péjoratif lié à une intolérance de l’homosexualité ?
C’est ce que nous voyons dans cet article, en musique bien entendu !
Si vous trouvez ce choix de chanson -au titre quelque peu ironique- étrange…attendez de découvrir la suite… Il se trouve que le grand livre de la Genèse et ses interprétations variées ne manquent pas, non plus, d’ironie.
Sommaire
Différentes définitions au fil du temps
Lorsqu’on recherche le terme sodomie, voici la première définition que le dictionnaire nous propose : copulation charnelle non-coïtale.
Donc, si vous êtes attentifs, vous remarquerez d’ores et déjà qu’on ne nous parle pas uniquement de sexe anal, ni d’homosexualité.
Pourtant, dans l’imaginaire collectif, ce sont les deux premières définitions du mot “sodomie” qui semblent “tomber sous le sens” !
Comme définitions annexes, on trouve diverses explications selon le contexte.
Le terme sodomie est compris dans l’histoire, la littérature et le droit dans plusieurs sens :
(1) comme désignant toute pratique homosexuelle entre hommes, en allusion à l’histoire biblique de Sodome (Genèse 18:19),
(2) comme désignant le rapport anal,
(3) comme synonyme de bestialité ou de zoophilie (c’est-à-dire les relations sexuelles entre les êtres humains et les animaux), et
(4) comme comportant un certain nombre d’autres activités sexuelles, allant des contacts sexuels avec des mineurs aux contacts bucco-génitaux et aux rapports bucco-génitaux entre adultes.
Il semblerait donc, que de façon générale, le terme de sodomie ait été utilisé pour décrire toutes sortes d’actes jugés, au fil des âges “immoraux”, “malpropres” et “pervers” plutôt que d’une pratique sexuelle particulière.
Explications dans le paragraphe qui suit !
Une interprétation Biblique erronée
Le mot sodomie dérive de l’ancienne ville de Sodome, qui fut divinement détruite en punition pour sa malveillance (Genèse 19).
Qu’est-ce qui rendait Sodome si impie et si digne d’être détruite ? La réponse habituelle est “l’immoralité sexuelle”, en particulier l’homosexualité. Et cette explication est, comme nous allons le voir, totalement fausse !
La loi sacrée de l’hospitalité
Pour la plupart des personnes ayant lu ou étudié l’ancien testament de nos jours, notamment aux cours de catéchisme, on peut y lire que Sodome a été détruite parce que ses habitants se comportaient avec une grande impiété, c’est-à-dire qu’ils allaient à l’encontre de la Loi Divine.
Le Dieu de l’Ancien testament (qui n’est donc pas encore miséricordieux) décide d’y envoyer deux de ses anges pour aller régler son compte à ces garnements de Sodomites.
Donc, les deux Terminators descendent tout d’abord faire un coucou à Abraham, qui est un bon pote de Dieu. Ils l’informent qu’ils vont tout faire péter à Sodome et Gomorrhe et, en gros, confient la tâche à Abraham de “passer le message à ses voisins” (est-ce de là que vient l’expression du téléphone arabe ? Je l’ignore !). Le pauvre Abe est un peu horrifié et les implore de demander à Dieu de faire preuve de pitié. Mais dans cette version primitive de l’histoire, comme mentionné auparavant, la miséricorde ce n’est pas vraiment son truc.
Le deuxième Airbnb dans lequel ils ont jeté leur dévolu est la maison de Lot, à Sodome donc. Ne pas confondre avec le Roi Loth du mythe Arthurien, non. Ce Lot là est un type plutôt sympa avec les deux étrangers (il faut dire aussi qu’il ignore qu’ils ont pour mission de rayer sa ville de la carte du monde).
D’ailleurs, la scène d’ouverture raconte l’extrême générosité et l’hospitalité de Lot. Lorsqu’il voit les étrangers, il leur propose de leur laver les pieds et de les héberger pour la soirée. Ils offrent la réponse coutumière : “Non, merci !”, mais Lot insiste une deuxième fois : “Mais vous devez venir dans ma maison !”. Les invités acceptent l’offre de Lot et prennent un repas avec du pain frais. Si vous avez visité le Moyen-Orient (ou tout autre pays non occidental), vous pouvez probablement imaginer cette scène. Il s’agit d’une interaction sociale standard (cf. Actes 16:15).
Les trois premiers versets traitent de l’hospitalité généreuse et de l’accueil gracieux de Lot. L’hospitalité de Lot reflète l’hospitalité d’Abraham à l’égard des mêmes anges en 18:1-5. Les parallèles sont évidents.
Abraham et Lot sont décrits comme des hôtes accueillants qui réservent un accueil généreux aux invités divins. Ensuite, dans les deux récits, la Genèse oppose ces actions justes à la méchanceté de Sodome (cf. Gn 18, 16-22).
La loi sacrée du consentement
Alors que Lot accueille les hôtes divins, l’histoire prend une tournure dramatique. Les habitants de Sodome viennent violer collectivement les deux étrangers dans la maison de Lot. Ils ne cherchent pas à avoir des relations sexuelles pour le plaisir physique, mais ils veulent affirmer leur pouvoir et leur domination sur les étrangers. Ils veulent envoyer un message : “C’est notre territoire ! Nous sommes les maîtres ici !”
L’atrocité du viol, en particulier du viol collectif, est digne de la punition divine (dans ce cas de figure, se faire pulvériser par les flammes), quel que soit le genre ou la sexualité de l’invité. Il s’agit d’un acte vicieux de domination et d’humiliation, et non de plaisir sexuel (cf. Gn 34 ; Jn 19). Comme quoi, ça ferait du bien à certains de s’éduquer un peu, parce que l’idée que le viol, c’est mal et que tout acte sexuel sans consentement et qui se fait dans l’agression, c’est du viol, ça ne date pas d’hier !
En conclusion, les habitants de Sodome ont refusé d’accueillir leurs hôtes et ont cherché à les agresser : ils ont donc été jugés et détruits. Un tel comportement est l’antithèse d’Abraham et de Lot, dont la juste hospitalité a apporté délivrance et bénédiction.
Dans l’évangile selon Matthieu 25:31-46, Jésus avertit que tous les “sodomites” qui refusent d’accueillir leurs invités seront confrontés à une damnation éternelle. Il faut donc reprendre les mots dans leur contexte et voir ici le terme “sodomite” comme un terme insultant qui n’a rien à voir avec le genre mais plutôt tout à voir avec l’agression et la domination.
La sodomie : originellement une histoire de domination
Lorsque les deux anges arrivent à Sodome, Lot et sa famille les accueillent chaleureusement. Les hommes de Sodome viennent dans la maison de Lot et exigent que les deux visiteurs leur soient livrés. Les intentions des Sodomites étaient ouvertement sexuelles (“afin que nous les connaissions”, connaitre dans le sens biblique est synonyme d’avoir des rapports sexuels, on le voit notamment dans la célèbre phrase “et Adam connut Eve, et ils eurent des enfants”), mais ces hommes n’étaient pas plus homosexuels que les brutes de nos prisons qui violent quotidiennement les nouveaux arrivants et les prisonniers plus faibles. Par ailleurs, je rappelle au passage que les anges sont, de façon notoire, asexués.
Bien que de nature sexuelle, ces attaques sont essentiellement des actes d’agression contre “l’autre”, ceux qui sont plus faibles et ceux qui sont différents.
Parenthèse sociologique sur le comportement sodomite en prison
Les violeurs des prisons perpétuent une ancienne tradition patriarcale horrible selon laquelle le mâle dominant a le droit de pénétrer toute personne qui lui est subordonnée – femmes, hommes inférieurs, garçons et esclaves.
Les études sociologiques à ce sujet, notamment celles d’Arno Schmidt, affirme que c’était “le droit des hommes de pénétrer et leur devoir de se coucher au-dessus” et que le viol “de ses esclaves … n’était pas seulement sanctionné par l’opinion publique, mais aussi par certains juristes”
Inutile de dire que les chrétiens médiévaux ont été contraints de déclarer que la position sexuelle de la “femme supérieure” était également, aussi incroyable que cela puisse paraître, une forme de sodomie, puisqu’elle symbolise une sorte de prise de pouvoir, de dominance de l’un sur l’autre.
Fort heureusement, les mentalités ont globalement évolué sur ces considérations et perspectives primitives et barbares, notamment comme nous pouvons le voir de nos jours avec les jeux de domination consentants, avec notamment l’aide de nombreux accessoires BDSM.
Evolution du terme et de la loi
Une pratique encore interdite et mal interprétée aux USA
La sodomie est un crime dans certaines juridictions des Etats-Unis et est condamnée comme une marque d’anormalité dans de nombreuses autres. Si on la condamnait dans le sens biblique, c’est-à-dire que l’on condamne toute agressivité et tout manquement au consentement, ce serait une bonne nouvelle.
Hélas, à cause de mauvaises traductions plus ou moins volontaires au fil des siècles, traductions faites, je vous le donne en mille, par des ecclésiastes qui cherchaient à asseoir leur pouvoir et leur domination sur la masse du peuple, l’amalgame est souvent fait entre sodomie et homosexualité.
La principale définition de la sodomie que nous connaissions de nos jours est “pénétration anale” et, chose encore plus grave, dans beaucoup d’états où elle est punie par la loi, est considérée comme sodomie toute relation sexuelle qui n’est pas “pénis-vagin entre un homme et une femme mariés”.
Certains codes juridiques prévoient des peines allant jusqu’à l’emprisonnement à vie pour les rapports homosexuels, même s’il s’agit de relations volontaires entre adultes légalement consentants.
En Europe : une évolution sûre, mais lente et récente
Les codes du Danemark, de la France, de l’Italie, de la Suède et de la Suisse, entre autres, ne contiennent aucune disposition de ce type.
Le comité Wolfenden en Angleterre et l’American Law Institute aux Etats-Unis ont recommandé l’abolition des dispositions pénales dans ce domaine, sauf dans les cas de violence, d’enfants ou de sollicitation publique au vice commercial.
Cette position a été adoptée dans l’Illinois en 1961 (et plus tard dans de nombreux autres États américains) et en Angleterre en 1967.
Des lois anti-sodomie rédigées en termes généraux ont également été utilisées, en de rares occasions, pour poursuivre des hommes ou des femmes considérés comme des “déviants sexuels“.
La masturbation mutuelle, par exemple, était connue pour avoir valu à certains couples des ennuis judiciaires, du moins avant que la majorité des États ne se débarrassent de leurs lois sur la sodomie dans les années 1970.
En 1986, la Cour suprême des États-Unis a confirmé la validité d’une loi anti-sodomie de Géorgie dans l’affaire Bowers v. Hardwick, mais la décision a été renversée en 2003, lorsque la Cour a invalidé une loi du Texas qui criminalisait les relations sexuelles consensuelles entre adultes du même sexe.
L’arrêt de la Cour dans l’affaire Lawrence v. Texas a eu pour effet d’annuler les lois anti-sodomie de 12 autres États américains.
Petit rappel si vous avez loupé le début : le mot “sodomie” lui-même est en quelque sorte un terme impropre, puisque la Bible ne mentionne pas de comportement homosexuel parmi les habitants de Sodome.
Cette ville corrompue n’a pas été détruite en raison d’actes de sodomie, mais plutôt parce que ses citoyens se sont montrés inhospitaliers à l’égard des messagers angéliques de Dieu. Ce n’est qu’au Moyen-Âge que Sodome a été associée linguistiquement à la sodomie.
Le mot de la fin
Qu’est-ce que la sodomie, au final ? A vous de choisir comment utiliser ces nouvelles connaissances ! Nous ne pouvons désormais que prendre en compte que, victime des incessantes ré-interprétations au fil des âges, ce terme qui condamnait un comportement haineux et dominateur a fini par servir la haine et la domination. Mais vous pouvez choisir, aujourd’hui et continuellement, de vous montrer curieux.se, de vous documenter, de mettre en pratique votre esprit critique et de ne pas systématiquement adopter une attitude négative lorsque l’inconnu se présente à votre porte, qu’il s’agisse d’un terme, d’une pratique, ou d’une autre personne.
Je pourrais vous inciter à lire L’Étranger de Camus ou encore les magnifiques poèmes de Victor Hugo à ce sujet, mais je vais me contenter de vous le suggérer.
En espérant que cet article vous aura plu et instruit, n’hésitez pas à nous laisser un message ou envoyez-nous vos questions par courriel à hello@gode-is-love.com ou sur nos réseaux sociaux.
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A très bientôt et prenez soin de vous !
SOURCES
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Voici les sources que nous avons utilisé pour la rédaction de cet article :
- “La grande histoire de la sodomie” – Article sur le site de Marie Claire
- “Sodomie” – Dictionnaire de l’Académie française
- “Histoire la sodomie” – Article sur le site Affection.org
- “Histoire de la sodomie” – Article sur le site Doctissimo
- “Brève histoire du péché de sodomie” – Article sur le site Libération